La rŽduction des risques vue de Vancouver

Vancouver est aujourd’hui, dans le paysage de la lutte contre le VIH et le VHC, une figure emblŽmatique de la RdR mais aussi du «test and treat», ce concept nŽ dans le milieu des annŽes 2000 et qui veut que plus on dŽpiste, plus on traite, mieux on informe sur la prŽvention, plus on maintien les personnes dans le systme de soins, plus on contrôle les pratiques et les virŽmies, plus on diminue la circulation de ces deux virus.

Vancouver, situŽe au sud-ouest de la province de Colombie-Britannique, sur la côte pacifique et la municipalitŽ canadienne la plus densŽment peuplŽe, s’est illustrŽe depuis longtemps dans ce qui fait le champ de la revue Swaps. Le premier programme d’Žchange de seringues a ŽtŽ implantŽ à Vancouver à la fin des annŽes 1980 au moment où le taux de prŽvalence VIH se situait à 2% parmi une population de 6 000 à 10 000 usagers de drogues injectables. Ce programme d’Žchange de seringues (PES) a ŽtŽ considŽrŽ comme le plus gros du continent amŽricain avec 2,3 millions de seringues ŽchangŽes en 1996. Transcriptases avait rendu compte de la premire Žtude de cohorte , mise en place en 1996, pour y Žtudier la prŽvalence du VIH et de l’hŽpatite C. Cette sŽroprŽvalence Žtait alors de 23,2% (intervalle de confiance (IC) 95%: 20,6-25,8) pour le VIH et pour le virus de l’hŽpatite C de 88% (IC95%: 85,2-90,8).

Vancouver a aussi ouvert, ds 2003, une salle d’injection, la premire au Canada. Les drogues illicites que les usagers se sont procurŽs antŽrieurement y sont injectŽes avec une supervision mŽdicale. Même si le gouvernement fŽdŽral avait refusŽ de subventionner le dŽveloppement de ce service avant que la Cour suprême dise «oui» à Insite, sise au 139, East Hasting Street ! Les chercheurs de l’universitŽ de Colombie-Britannique, menŽs par Julio Montaner et Thomas Kerr ont montrŽ ds 2011 qu’Insite rŽduisait de 35% les overdoses mortelles autour de la salle.

Dix ans aprs, le projet «Seek and Treat for Optimal Prevention of HIV/AIDS (STOP)» se prŽsentait comme un projet pilote triennal financŽ par le ministre de la SantŽ Canadien qui a pris fin le 31 mars 2013. Le projet avait pour but d’Žlargir les services de dŽpistage, de traitement, de soins et de soutien en vue de rŽduire la transmission du VIH et d’amŽliorer la qualitŽ de vie des personnes vivant avec le VIH, application stricte du test and treat. Ce projet a parfaitement rŽussi, tel que le rŽsume le site Catie, à transformer tout le systme de soins dans la ville en associant dŽpistage du VIH, diagnostic, repŽrage des cas et arrimage aux soins pour les clients actuels et nouveaux, traitements du VIH et aide à l’observance thŽrapeutique, ainsi que les services de soutien en lien avec le VIH. Il visait les objectifs suivants concernant le VIH/ sida : en rŽduire l’incidence; amŽliorer le dŽpistage prŽcoce; assurer un accs en temps opportun à des soins et à des traitements sŽcuritaires et de grande qualitŽ; amŽliorer l’expŽrience du client à chaque Žtape de son parcours; et dŽmontrer une optimisation du systme et des coûts. En 2010, à son lancement, des donnŽes indiquaient que le modle de dŽpistage fondŽ sur le risque, à Vancouver, ne joignait pas tous les individus qui avaient besoin d’un test de dŽpistage, environ 25% des personnes vivant avec le VIH n’Žtaient toujours pas au courant de leur sŽropositivitŽ, et ce malgrŽ de nombreuses occasions de dŽpistage. Dans 60% des cas, le diagnostic Žtait jugŽ tardif et la personne dŽpistŽe devait dŽbuter un traitement anti-VIH. Ce projet a aussi permis d’Žlargir et d’amŽliorer la notification des partenaires par la santŽ publique (qui n’existe pas en France) et de l’intŽgrer plus efficacement aux traitements, aux soins et au soutien liŽs au VIH. En mettant en œuvre le traitement comme outil de prŽvention (Treatment as Prevention [ TasP ]) dans le monde rŽel, il a rŽussi à atteindre ses objectifs, mais a aussi permis de recueillir beaucoup de renseignements sur l’Žtat idŽal des services liŽs au VIH à Vancouver, comme ailleurs. Julio Montaner (Vancouver, Canada), avec sa gouaille sud-amŽricaine, fait dŽsormais le tour du monde et de ses congrs pour montrer le succs du modle de la Colombie-Britannique où «le TasP, c’est si simple». Opposition avec les Žtats-Unis, leur cascade de «linkage of care» dŽsastreuse, où tout est si compliquŽ, tant les deux modles sanitaires et sociaux diffrent. Selon Montaner, les nouvelles infections VIH ont considŽrablement baissŽ sous le poids de la prŽvention combinŽe et de l’accs au soin «gratuit», il martle souvent le mot free sous les applaudissements des AmŽricains prŽsents dans la salle (prŽvention combinŽe: prŽservatif + Žchanges de seringues + produits de substitutions aux opiacŽs + counseling + TasP, etc.). La Colombie-Britannique est elle-même un modle à l’intŽrieur du Canada par rapport à d’autres provinces.

En Colombie-Britannique ds 2004(!), par l’intermŽdiaire de son Centre d’excellence sur le VIH/sida, le TasP VIH a ŽtŽ instituŽ, principalement dans une population d’usagers de drogues. Dans les cinq annŽes qui ont suivi,le nombre de personnes vivant avec le VIH traitŽes dans le cadre du TasP est passŽ d’environ 3 500 à 5 500. En 2009, prs de neuf personnes sur dix avaient une charge virale indŽtectable, ce qui les rendaient peu ou pas contaminants. Paralllement, entre 2004 et 2009, le nombre de nouvelles infections est passŽ de 404 à 338, dŽmontrant l’impact du traitement sur la circulation du VIH. Plus globalement, cette province canadienne a observŽ un dŽclin de 1% dans le nombre de diagnostics de VIH pour chaque augmentation de 1% de la couverture antirŽtrovirale. Et ces amŽliorations ont ŽtŽ les plus marquŽes chez les usagers de drogues injectables.

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